Lewis Howard Latimer, le père de l'éclairage moderne.
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J’ai récemment suivi de loin une conversation, entre deux personnes noires africaines. La discussion portait sur l’apport scientifique et technologique de la race noire à l’histoire de notre espèce et de notre monde. L’un des protagonistes était catégorique :
Les noirs n’avaient de manière concrète rien n’apporté en termes de sciences et d’innovations au monde.
On peut trouver à ce protagoniste beaucoup d’excuses ; mais tout aussi concrètement, à notre époque, l’ignorance est un choix. Les moyens et outils pour se documenter, s’instruire, combler les lacunes du système éducatif de base sont multiples et intarissables.
Prologue.
Même si l’idée de la création de ce blog, et de ce type de contenus est antérieure à cet événement, il l’a grandement encouragé. Car une personne qui lira un des articles de la catégorie Savants & Personnalités Noirs, sera une personne de plus qui ne sera pas dans la même ignorance coupable.
Cet article inaugurale, part à la découverte de Lewis Howard Latimer : un inventeur, ingénieur et dessinateur qui a vécu entre 1848 et 1928 aux Etats-Unis. Il n’y a pas meilleur exemple pour commencer et illustrer cette catégorie que celui de Lewis Howard Latimer.
Il est considéré comme l’un des inventeurs afro-américains les plus importants, pour le nombre d’inventions qu’il a produites et de brevets qu’il a obtenus, mais aussi pour l’importance de ses découvertes.
Beaucoup de choses que nous considérons comme acquises aujourd’hui on dû être à un moment inventé par quelqu’un. Et Howard Latimer fait partie de ces personnes qui ont largement contribué à améliorer les conditions d’existence et d’apprivoisement de l’habitat naturel de l’Homme.
Une vie d’auto-dictate.
Nous sommes en dans les années 1840 aux Etats-Unis. L’esclavage est toujours une pratique légale dans les Etats du Sud.
George Latimer, le père de Lewis Latimer, était un esclave dans l’Etat de Virginie. Le jeune couple, George et Rebecca Latimer décida de fuir cet Etat du Sud des Etats Unis, pour s’installer dans le nord, où l’esclavage était aboli. Ils seront arrêtés lors de cette tentative de fuite et après un procès houleux, obligés de retourner avec leur maître. Heureusement, des abolitionnistes les défendirent et proposèrent leur rachat à leur maître qui s’y résolu pour un montant de 400$. Le couple sera ainsi affranchi et grâce à leur histoire la poursuite des esclaves en fuite sera désormais interdit dans l’Etat du Massachusetts.
Lewis Howard Latimer naît 6 ans après cet épisode à Chelsea, près du Massachusetts. C’est le quatrième enfant du couple. Ayant déménagé à Boston avec ses parents, Lewis suivra les cours jusqu’à l’âge de 10 ans.
George Latimer, disparaîtra peu de temps après la décision de la Cour suprême des États-Unis de 1857 , dans laquelle elle statuera qu’un esclave, ne pouvait pas poursuivre pour sa liberté. Il craignant peut-être un retour à l’esclavage.
Pour soutenir sa mère et ses frères et sœurs, Lewis travaillera tour à tour comme tapissier, balayeur dans une salon de coiffure, employé de bureau et matelot dans la marine (où il trichera sur son âge pour être recruté). A la fin de la Guerre de Sécession (guerre qui entre autres mis fin à l’esclavage), Lewis retournera à Boston et sera engagé comme employé de bureau dans une entreprise spécialisée dans les droits de brevets (titre de propriété sur une invention). Il s’instruira tout seul du dessin mécanique en observant le travail des dessinateurs de l’entreprise.
Reconnaissant le talent et la promesse de Latimer, les associés du cabinet lui offriront une promotion qui le fera passer de garçon de bureau à dessinateur. Il deviendra rapidement indispensable dans la rédaction des brevets et sera promu Chef de service des dessins industriels. Il déposera son premier brevet en 1874. Durant toute sa carrière, Latimer a conçu un certain nombre d’inventions, mais a aidé également plusieurs autres inventeurs dans la rédaction et les dessins de leurs inventions.
Latimer déposera plusieurs brevets :
- WC à eau pour wagons.
- Appareil de refroidissement et de désinfection (unité de climatisation).
- Rangement verrouillable pour chapeaux, manteaux et parapluies.
- Processus de fabrication de carbones.
- Luminaire.
- Support d’ampoules pour lampes électriques.
- Lampe électrique.
Il aidera également d’autres inventeurs célèbres comme Graham Bell et Thomas Edison.
Travaillant tard le soir, Latimer permettra à Graham Bell d’être le premier à déposer le brevet sur le téléphone. Il sera soumis le 14 février 1876, quelques heures seulement avant qu’une autre demande soit faite pour un appareil similaire. Avec l’aide de Latimer, Bell remportera les droits de brevet sur le téléphone. A ce titre, il dessinera le premier modèle de téléphone.
L’ampoule (électrique)
Non. Thomas Edison n’a pas inventé l’ampoule. C’est l’oeuvre de Joseph Swan, qui en 1879 présenta une lampe à incandescence fonctionnelle, utilisant de la combustion sous vide d’air d’un filament de carbone. Bien avant lui, plusieurs autres initiatives avaient émergé, mais aucune dans une visée industrielle.
Thomas Edison, présenta la même année une ampoule avec un filament de fibre de coton carbonisé. Considérant que ses travaux avaient été volés, Swan poursuit Edison en justice pour réclamer la paternité de l’invention de l’ampoule à incandescence. La justice donnera raison à Joseph Swan et les deux scientifiques seront alors contraints de travailler ensemble pour essayer de produire à une échelle industrielle leur invention.
Malgré leur collaboration conjointe l’ampoule de Joseph Swan et d’Edison présentait toujours plusieurs lacunes qui empêchaient sa fabrication et son utilisation à une échelle industrielle.
- La lourdeur de l’ampoule, et son prix relativement élevé empêchait sa vulgarisation dans les foyers.
- Sa durée de vie maximale était de 30 (trente) heures ; donc il aurait fallu la changer quasi-quotidiennement.
- La combustion opacifiait rapidement le verre de l’ampoule ce qui diminuait considérablement la vivacité de la lumière.
Le père de l’éclairage moderne
Le filament de carbone.
Engagé plus tard comme directeur adjoint et dessinateur pour la US Electric Lighting Co., une société distributrice de la lampe à incandescence et de l’électricité, concurrente de la société d’Edison, Lewis Latimer va s’atteler à créer une lampe électrique, moins lourde et à trouver un filament dont la combustion pouvait durer indéfiniment.
Latimer développera un moyen d’enfermer le filament dans une enveloppe en carton qui empêchait le carbone de se briser. Cette ingéniosité révolutionna l’industrialisation de l’ampoule. Car elle permettra de :
- Obtenir des ampoules moins lourdes, utilisable dans les foyers.
- Augmenter considérablement la luminosité de la lampe.
- Diminuer le prix de vente de la lampe.
- Augmenter pour un temps beaucoup plus long, la durée de vie des lampes.
Il déposera un brevet pour cette invention avec son ami et collègue de travail Joseph V. Nichols.
C’est ainsi, en tant que père de la nouvelle ampoule électrique que Lewis Latimer va diriger l’installation de la lumière électrique dans plusieurs villes des Etats-Unis comme Philadelphie, la Pennsylvanie et New York. Il apportera également son expertise à Montréal où il s’efforcera d’apprendre le Français pour donner directement des instructions aux ouvriers. Il a également supervisé l’installation de l’éclairage dans les gares ferroviaires, les édifices gouvernementaux et les grands axes routiers au Canada, en Nouvelle-Angleterre et à Londres.
Mais Lewis Latimer ne s’arrêtera pas là. Avant ses travaux, lorsqu’une ampoule dans un système électrique grillait, toutes les autres cessaient également de fonctionner. Il réfléchit et mit en place un nouveau système de câblage, qui résolvait ce problème. Lewis Latimer est donc également l’inventeur des circuits en parallèle.
Collaboration avec Edison
Ses chemins croisent celui de Thomas Edison en 1884. Il est recruté par ce dernier en tant qu’ingénieur chercheur, dessinateur en chef, spécialiste des brevets et témoin expert pour améliorer sa lampe à incandescence et surtout contourner le brevet de Joseph Swan. Il a travaillé au service juridique de l’Edison Electric Light Co. en tant que dessinateur en chef et spécialiste des brevets. Il a rédigé des croquis et des documents liés aux brevets d’Edison, a examiné des plaintes à la recherche de contrefaçons de brevets, a effectué des recherches de brevets et a témoigné devant le tribunal au nom d’Edison.
Cette collaboration permettra à Thomas Edison de déposer un nouveau brevet différent de celui de Joseph Swan pour les lampes à incandescence. Latimer publira ses travaux dans le livre Electric Lighting : A Practical Description of The Edison System, l’un des premiers manuels sur l’éclairage électrique, qui est un guide technique pour les ingénieurs électriciens.
Il sera nommé plus tard au Conseil de Surveillance des Litiges concernant les brevets, poste qu’il occupera jusqu’en 1911. En 1918, Latimer est devenu membre fondateur des Edison Pioneers, un groupe honoraire de scientifiques qui avaient travaillé pour les laboratoires de Thomas Edison.
Actions civiles.
En dehors de ses recherches scientifiques, Lewis Latimer œuvrait activement pour l’intégration raciale. Il s’installa dans un quartier majoritairement blanc pour favoriser l’intégration. En 1902, il fit circuler une pétition au maire de New York, exprimant sa préoccupation quant au manque de représentation afro-américaine au sein du conseil scolaire.
En plus de ses talents de rédacteur, Latimer aimait d’autres passe-temps créatifs, notamment jouer de la flûte et écrire de la poésie et des pièces de théâtre. Dans ses temps libres, il a enseigné le dessin mécanique et l’anglais à de récents immigrants au Henry Street Settlement à New York.
Postérité
Lewis Latimer épousa Mary Wilson en novembre 1873. Le couple a eu deux filles, Emma Jeanette et Louise Rebecca. Au cours des années suivantes, Latimer a continué d’afficher ses capacités d’innovation.
En 1894, il a créé un ascenseur de sécurité, une grande amélioration par rapport aux ascenseurs existants. Lewis Latimer mourut à 80 ans, le 11 décembre 1928 à New York.
Aujourd’hui une école à Brooklyn porte son nom. Son ancienne maison a été racheté par le service municipal de New York. L’extérieur est transformé en parc et l’intérieur en un musée à sa gloire.
Epilogue
Lewis Latimer, enfant d’esclave affranchi, avec peu d’éducation, est devenu un inventeur qui a joué un rôle majeur dans le développement de deux produits qui ont eu des impacts massifs sur la vie des humains : l’ampoule et le téléphone. Il a accompli tout cela dans une société américaine post esclavage, gangrené par le racisme, sans aucune forme d’études supérieures. A coup d’auto-apprentissage, de recherches et d’ingéniosité, il est devenu l’un des inventeurs les plus importants de notre époque.
Ce récit ne vaut il pas la peine d’être présent dans nos manuels d’histoire ?
Terminons sa biographie par quelques unes de ses citations :
Il est nécessaire que nous montrions à la population de ce pays que,
par notre martyre sous le fouet, par notre héroïsme sur le champ de
bataille, par notre patience chrétienne sous un fardeau accablant
d’injustice et par notre soumission aux lois du pays, nous avons
prouvé que nous étions des citoyens dignes de notre pays commun.
Les deux forteresses qui sont les dernières à céder dans le cœur humain sont l’espoir et la fierté.
L’espérance jaillit éternellement dans le sein humain et est aussi nécessaire à la vie que l’acte de respirer.
Nous créons notre avenir, en améliorant bien les opportunités présentes: si petites et petites qu’elles soient.
Dîtes nous dans les commentaires ce que cette histoire vous inspire. Connaissiez vous déjà ce scientifique ? Si oui, comment l’avez vous découvert ?
Sources
- Lewis Howard Latimer Biography.
- Encyclopedia.com : Latimer, Lewis Howard.
- Biographie de Lewis Latimer, inventeur afro-américain reconnu.
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